Exposition Pour Ce(ux) qui reste(nt) d’Anne Laval

Exposition personnelle d’Anne Laval

15 juin – 22 septembre 2024

Écomusée du Perche
Prieuré de Sainte-Gauburge
61130 Saint-Cyr-la-Rosière

Tél. 02 33 73 48 06

Ouvert tous les jours de 10h30 à 18h30

« Ma création naît des matières que je rencontre, que j’apprivoise, et que j’adopte. Elles prennent alors place dans l’atelier. Il devient leur gîte. Je vis dès lors avec des nids de matières premières : laine et gaze d’acier, porcelaine, verre… De par leur origine minérale, ces matières se développent de manière organique. Intuitivement, je dialogue avec leur fragilité. Je cherche leur ADN formel. Alors je donne à chacune de ces matières une formule structurelle et un rôle symbolique.
La laine d’acier devient  » panorama de poussière « , la porcelaine devient la  » forêt d’ossements « , le verre devient  » souffle reliquaire « . Après recherches et essais, je tente de donner vie au minéral inerte en cheminant vers l’œuvre.
Il en résulte des volumes suspendus ou à terre comme autant d’abstractions naturalistes que le moindre courant d’air et mouvement vient réanimer.
Les liens entre la matière, le végétal, l’animal, le minéral et l’humain sont au cœur de ma recherche.

“Pour ce(ux) qui reste(nt)” au prieuré Sainte Gauburge

Les matières qui dorment dans mon atelier trouvent parfois écho avec les lieux où j’expose et dont je m’imprègne. Certaines fois ce sont de nouvelles matières qui viennent à moi. Dans l’église de Sainte Gauburge, qui est très épurée, il n’y a plus que l’espace, au service du silence, de la méditation. La religion y est presque impalpable.

Christian Boltanski disait : « je veux qu’on rentre dans mes expositions comme on rentre dans une église ».

J’ai toujours eu une fascination pour les édifices et reliques religieux. Dans mon enfance, j’étais impressionnée que des personnes puissent garder des cheveux, des tissus, des os, de l’eau en croyant que cela pouvait avoir des pouvoirs, du fait que ceux-ci appartenaient à un saint ou une sainte. Cela me paraissait tout à fait incroyable et porteur d’imagination. Mes titres d’œuvres sont souvent pourvus de symboles, et parfois quand je transforme des matières grâce à la création je me sens un peu comme une sorcière. Dans cet édifice la lumière du chœur proche du ciel, contraste avec l’autre partie la nef dévolue autrefois aux manants, plus sombre pour la prière. Cette opposition m’a intéressée pour la suite de mon travail.

Installation  » Les trois linceuls du Monde « 
Pour cette installation j’ai imaginé un linceul, qui, au lieu d’être pour un corps, serait pour le monde entier. Ainsi j’ai créé trois suaires qui ont comme matière première un voile d’hivernage. On met ordinairement celui-ci sur la terre endormie pour la protéger de l’hiver, en attendant sa renaissance au printemps. Ensuite j’ai dessiné des matrices, représentant des continents inventés ou suggérés, qui deviennent comme des motifs et viennent s’imprimer sur ce voile. J’ai voulu suggérer la douleur du monde, de l’humanité, actuelle et passée . J’ai tenté d’évoquer les frontières absurdes dues à des politiques et des religions qui négligent l’humain.
Ces  » linceuls de monde  » sont comme des peaux : l’un a été trempé dans la cire, l’autre a été piqué de poil de laine, et le dernier a été brulé. Leur translucidité démontre une fragilité. Ils sont placés dans la partie sombre de l’église. Suspendus du ciel au sol, ils peuvent onduler avec le vent ou le passage du spectateur. Comme une trace vivante d’une carte sensible.

Installation  » Mondes Fossiles « 
Une autre matière entre en scène pour cette installation : la porcelaine. Elle a toujours été, pour moi, symbole d’ossements. Avec cette matière, j’ai moulé des parties de corps de personnes que je rencontrais. La porcelaine a été estampée dans les moules pour en prendre l’empreinte.
En imaginant qu’il existait peut-être un ossuaire dans l’église, j’ai associé la porcelaine avec des « cheveux de cuivre » qui laissent une trace noire en brûlant au four. Cette association transforme les matières en fossile. Les morceaux de corps estampés en forme de continents, les cheveux de cuivre brulés, enracinés , dessinent des pays. Ils sont positionnés sur un lit de cendre circulaire comme une mappemonde évoquant un monde fossile.

Installation  » Forêt d’ossements « 
L’idée est née d’une lecture d’un livre de Claude Ponti. Le personnage en quête de ses parents arrive chez une sorcière qui a, autour de sa maison, une forêt d’ossements. Elle enterrait ses victimes, et ils repoussaient en arbres d’os. Cela m’avait bouleversée. Avec de la porcelaine, durant un hiver (le temps de la mort de la nature), j’ai façonné des branches sur un fil d’acier. Je les avais ensuite tressées pour créer une forêt. Cette œuvre se présente normalement suspendue, mais en raison de la présence de l’autel, j’ai opté pour une nouvelle disposition qui la fait apparaître comme une offrande.

L’installation  » Paysage perdu « , suspension en gaze d’acier inoxydable, symbolisant un vent étrange, entre eau et air, est installée au milieu des vitraux pour profiter d’une ombre portée à la chance d’un rayon de soleil, trace éphémère et impalpable.

Les  » Souffles reliquaires  » et les  » Petites écumes «  prennent vie dans les piscines, espaces qui servaient à vider l’eau bénite.

Ainsi chaque partie de l’église dialogue avec une œuvre ou une installation, se reflète en elles dans une fragile osmose. Elles se révèlent mutuellement par des liens imperceptibles, un rapport particulier à la lumière et à l’instant… »

Anne Laval – Monde Fossile ou Monde morcelé-installation-2024- porcelaine et cheveux de cuivre sur lit de cendre- dimension variable (détail)

Anne Laval- Linceul du Monde (fragment) 4-2024-70/50 cm – impression sur voile d’hivernage brulée, cirée, et piquée de laine

Anne Laval – Vue de l’exposition